Dans La mémoire d'un Irlandais
Pétales de cendres, deuxième roman du Neuchâtelois Serge Bregnard, a pour cadre les «deux Irlandes», celle du Nord où six des comtés d’Ulster vivent sous administration britannique, et celle du «Sud», la République d’Irlande. Tout au long d’une seule journée, de l’aube au crépuscule, Matthew Ryan, activiste politique républicain, se souvient de ce qu’a été sa vie sur l’île d’Erin.
Le temps défile lentement au fil de ses réminiscences. Le lancinant conflit, les «troubles» entre communautés, les affrontements tant dans Belfast qu’à Derry (deux villes du Nord) occupent bien entendu une place importante. Ressurgissent ainsi les souvenirs d’une famille ensanglantée par la mort de deux parents dans un attentat à la bombe. Au fur et à mesure de ce processus de dévoilement, le lecteur a accès à la vie souvent difficile sur le plan matériel d’une famille marquée par des changements de domicile, le deuil, la sale guerre et l’anorexie d’une sœur, mais aussi par l’affection, la mise en route de nouvelles solidarités et de nouveaux liens de confiance. L’atmosphère à plus d’un titre grise voire oppressante n’empêche pas non plus l’émergence d’un certain humour: qu’on songe au père commentant la façon dont ses enfants jouent au rugby en imitant la voix d’un chroniqueur sportif, ou à Matt lorgnant pour la première fois les filles à son entrée à l’école secondaire. Pétales de cendres raconte au final avec émotion et profondeur la vie d’un homme qui se demande comment il a fait pour ne pas devenir fou.
Article paru dans le journal « Le Courrier », VENDREDI 26 AOÛT 2011
Marc-Olivier Parlatano