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Slatkine 2022
Trois amis, Paul, Jonas et Galel, une même passion pour la montagne et un rendez-vous annuel au refuge de la Baïta, voilà le fil rouge du premier roman de Fanny Desarzens.
Dès les premières lignes, l’auteure nous emmène dans des décors changeants, passant d’un paysage coloré d’arbres, de fleurs et d’herbes, à une contrée de rocaille. En décrivant avec abondance de détails la progression d’une colonne de marcheurs, le rythme de l’écriture est lancé, pareil à la cadence plus ou moins lente des randonneurs.
Tout est dépouillé et authentique ici, à l’image de ces espaces d’altitude.
D’abord, le récit qui se déroule sans grand suspense, si ce n’est le vent qui se lève, une pierre qui roule, la voix stimulante du guide ou encore… le cri d’un marcheur qui vient de tomber.
Ensuite, des mots simples pour traduire les bruits et les silences, pour parler de la solitude des hommes, pour dire l’ambiance conviviale des repas et des soirées partagés.
Enfin, des dialogues brefs pour exprimer les sentiments des personnages principaux. En effet, ces derniers se suffisent d’une poignée de main, d’une tape sur l’épaule ou d’un regard pour se comprendre et se témoigner leur amitié. Tels sont souvent, ces gens de la montagne, sobres et sauvages comme leur environnement !
Même l’intrigue que l’on devine au fil des pages, et qui tourne autour de Galel, héros central de l’histoire, reste discrète jusqu’au point final.
Malgré cette pudeur tout au long de la narration, Fanny Desarzens ne se prive pas de dépeindre précisément chaque instant de vie des protagonistes, là-haut, durant la saison d’été, ou en bas, lors du repos hivernal.
Une fiction qui ressemble bien à du vécu et qui permet au lecteur de découvrir ou de redécouvrir la montagne, dans toutes ses exigences, ses rudesses et ses beautés.
Recension Marylène Rittiner
Extrait : p. 107-108
Ça fait que les au revoir du lendemain sont un peu difficiles. Jonas a son chapeau, sa casserole. Galel a son piolet. Juste avant il a apporté une pomme pour Ariel. Là il est temps de continuer le tour de Saingal. Cette fois Jonas passera par l’hôtel Alsane tandis que Galel commencera déjà à redescendre. Paul leur donne une miche de pain. Celle de Jonas est ornée de fleurs qu’il a sculptées avec la pâte. Sur celle de Galel il y a un gros soleil. Et ils se disent au revoir. Galel les prend dans ses bras. Il serre très fort mais pas très longtemps. Paul est un peu ému. Jonas aussi. Ils essaient de le cacher, mais Galel leur dit : oh ne commencez pas. Mais il baisse la tête, lui aussi a les yeux un peu embués. Il leur dit encore, tout doucement : je pensais que les choses viendraient à moi puisque j’ouvre les bras. Mais ça ne va pas toujours comme on veut, hein.
Jonas et Paul lui sourient du mieux qu’ils peuvent, ils hochent la tête.
- Au moins je n’aurai jamais peur que les choses me soient reprises.
Paul dit qu’ils pourront se voir en bas, Jonas approuve et Galel répond : oui, c’est vrai, il y a le bas. Ils restent un moment dans cette tranquillité du jour.
Peu à peu il efface complètement le bleu laissé par la nuit d’avant. C’est vraiment l’heure de se quitter. Galel se tourne vers sa troupe qui l’attend, il se retourne sur Jonas et Paul. Alors il dit : en tout cas, merci pour tout. Ça été magnifique.