L'Harmattan 2017
Maladie, disparition, deuil, suicide, meurtre, voici le cocktail que nous sert Béatrice Thièry dans ses quelques nouvelles. Avec, au passage, des émotions en tout genre telles que nostalgie, chagrin, angoisse, regret, et encore détresse, perte de repères, violence et folie. De quoi déprimer, direz-vous ! Pourtant, tout cela ne ressemble-t-il pas étrangement à la vie de beaucoup d’entre nous ?
En effet, l’auteure nous entraîne ici dans un tourbillon de souffrances et de drames souvent non résolus et vécus par nombre d’êtres humains. Cependant, la délicatesse et la pudeur avec lesquelles elle nous les livre atténuent quelque peu la tristesse de ses récits.
Et si d’aventure le lecteur se reconnaît dans l’une de ces histoires, peut-être éprouvera-t-il un peu de réconfort à l’idée que des personnages, même fictifs, puissent vivre des malheurs similaires. Recension: Marylène Rittiner
Extrait page 56
Les jours suivant sa mort, je n’avais pas cessé de le croiser. Soudain, au coin d’une rue, un homme s’avançait : il avait sa démarche, la même silhouette massive, la même allure désinvolte, quelque chose de particulier qui attirait mon regard. Mon cœur alors s’emballait, je savais que c’était lui et que tout allait pouvoir recommencer… Puis les traits de l’inconnu se brouillaient, se déformaient de manière grotesque ; dans le flot de la foule, je m’arrêtais et les passants se retournaient sur moi. Mon cœur mettait ensuite de longues minutes à retrouver un rythme normal et j’avais pendant longtemps encore ce vague dans la poitrine, cette douleur surtout, qui fait plus mal que toutes les autres, car elle ne semble pas destinée à s’arrêter un jour. Était-il possible, après tout ce temps, que le destin me fasse encore ce genre de farce ? Plus je le regardais, plus la ressemblance se précisait.