Esther Rotenberg

|||

« Écrire, c’est une façon de parler sans être interrompu » a écrit Jules Renard dans son journal et Henri Michaux, comme en écho, a déclaré : « J’écris pour me parcourir ».


Il y a sûrement un peu de ces deux aphorismes dans mon désir d’écriture. Personnellement, j’ai la passion des dialogues qui ripostent (sûrement en lien avec ma carrière d’avocate habituée aux joutes du prétoire) et me suis longtemps tournée vers le théâtre, privilégiant cette écriture ramassée qui me permettait de dire ou faire dire ce que je supposais ou comprenais du monde qui m’entourait ou de personnages que j’admirais. Je me suis intéressée ainsi à Stefan Zweig dans sa façon intime de s’être relié à l’histoire, à une période de sa vie où son parcours d’intellectuel reconnu ne lui a pas épargné l’affrontement avec la fureur de son époque. J’ai ainsi écrit une pièce de théâtre « la femme silencieuse », confrontation de l’écrivain à l’histoire telle qu’il la vit en 1933 avec son départ à Londres pour écrire un manuscrit sur Marie Stuart, et sa rencontre avec sa secrétaire qui deviendra sa deuxième épouse alors qu’il est encore marié et que sa femme a préféré rester en Autriche.

 


De mon expérience d’avocate, j’ai tiré une comédie « La mémoire du frelon » inspirée du constat d’une justice sans visage qui fait que l’on ne connaît rien de la personne que l’on juge et me suis amusée à faire rencontrer une juge et son justiciable en train de repeindre son salon en ignorant sa véritable identité.

 


Plus récemment, j’ai écrit  Nos Inconséquences, cinq saynètes en lien avec ce que l’on prête à nos insignifiances et qui ont en réalité des effets dévastateurs pour celui à qui elles sont destinées.


Mon dernier récit  Tout commence avec toi , tiré de mon expérience, se veut d’abord comme un récit de vies plurielles, dans lequel beaucoup de femmes peuvent se reconnaître dans leur quête et leur chemin de vie :
- La prise de conscience d’une voie à emprunter d’urgence si on ne veut pas risquer de suivre une autre vie que la sienne

 

J’ai souhaité le raconter à travers un personnage plutôt qu’à la première personne précisément pour pouvoir agréger plusieurs parcours et mettre de la distance par des passages romancés.

 


J’espère surtout à travers ce texte, pouvoir aider celles et ceux qui aborderaient cette façon d’être parent en ayant la même confiance et en faisant preuve du même optimisme et d’absence de préjugés qu’à travers l’expérience d’une filiation biologique.


J’ai aussi souhaité me situer au niveau de l’enfant adopté qui n’a pas besoin d’accoler en permanence l’explication de son passé pour justifier son présent.

 


Ce récit, je l’ai voulu sans pathos, joyeux et bien sûr forcément émouvant, où rires et émotions se donnent la réplique.

 

Pour terminer, je souhaite rendre hommage aux auteurs qui m’accompagnent et que j’admire, Jean Anouilh pour le théâtre et sa description grinçante de la comédie humaine, Fernando Pessoa pour son « livre de l’intranquillité » que j’ouvre à n’importe quelle page en y trouvant toujours une réponse, et à Albert Camus et Philip Roth pour l’ensemble de leur œuvre dans laquelle il m’est difficile de faire des choix.